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Le journaliste algérien Ihsane El Kadi condamné à trois ans de prison ferme - Médiapart


Illustration Walid Kechida



Détenu depuis fin décembre dans le cadre d’une enquête pour « financement étranger de son entreprise », cette figure de la presse algérienne indépendante a été condamnée, dimanche 2 avril, à cinq années de prison, dont trois ans ferme. L’un de ses avocats a annoncé faire appel de ce jugement.


Le patron de presse algérien Ihsane El Kadi, figure de la presse indépendante algérienne, a été condamné dimanche 2 avril à cinq années de prison, dont trois ans ferme, a annoncé le tribunal de Sidi M’hamed à Alger, qui a rendu son verdict en présence de l’accusé.


Le parquet avait requis cinq ans de prison ferme, assortis d’une interdiction d’exercer pour la même durée à l’encontre du dirigeant d’un des derniers groupes de presse indépendants d’Algérie, qui comprend Radio M et le site d’information Maghreb Emergent.


Le tribunal a également prononcé la dissolution de la société Interface Médias, éditrice des deux médias dirigés par Ihsane El Kadi, la confiscation de tous ses biens saisis, et 10 millions de dinars d’amende (plus de 68 000 euros) contre son entreprise. La société a été condamnée également à dédommager l’Autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV) à hauteur de 1 million de dinars (6 800 euros). À titre personnel, il a été condamné à payer une amende de 700 000 dinars (environ 4 800 euros).


« Nous allons faire appel de ce jugement dans les délais requis, selon l’accord préalable avec notre client », a annoncé à l’Agence France-Presse Me Abdelghani Badi, un des avocats de la défense qui a boycotté l’audience.


Des soutiens du monde entier

Emprisonné depuis le 29 décembre 2022, Ihsane El Kadi était accusé de « financement étranger de son entreprise » – et plus précisément d’avoir reçu « des fonds et des avantages de provenance étrangère aux fins de se livrer à une propagande politique » – au titre de l’article 95 bis du Code pénal. Ce texte prévoit une peine de prison de cinq à sept ans pour « quiconque reçoit des fonds, un don ou un avantage… pour accomplir ou inciter à accomplir des actes susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’État, à la stabilité et au fonctionnement normal de ses institutions, à l’unité nationale, à l’intégrité territoriale ».


Selon les avocats du journaliste, on lui reproche un financement venu de l’étranger, notamment un transfert de la somme de 25 000 livres sterling (environ 28 000 euros) effectué par sa fille, Tinhinane Kadi, résidente au Royaume-Uni et actionnaire d’Interface Médias. L’argent devait servir au paiement des salaires des employés à la suite du blocage des comptes de la société à cause d’une dette fiscale.


Depuis des mois, des années, comme d’autres journalistes, Ihsane El Kadi, dans le collimateur du pouvoir algérien, subissait un harcèlement policier, administratif et judiciaire. Son cas illustre le sort fait aux voix libres et aux médias indépendants en Algérie. Début janvier, seize patrons de presse de divers pays, dont le prix Nobel de la paix Dmitri Mouratov, réunis par Reporters sans frontières (RSF), avaient appelé à sa libération et à lever les entraves « inadmissibles » visant ses médias.


L’arrestation du journaliste et la mise sous scellés des bureaux des médias qu’il dirige ont suscité une vague de solidarité parmi ses collègues et les militants des droits humains en Algérie et en Europe. Une pétition lancée par l’organisation RSF pour obtenir sa libération a recueilli plus de treize mille signatures.

La rédaction de Médiapart




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